La vacance résidentielle, un symptôme d’inefficacité publique, selon la Cour des comptes



Jeudi 22 Mai 2025
Anton Kunin

Le 22 mai 2025, la Cour des comptes a rendu public un rapport d’évaluation très critique sur la politique nationale de lutte contre la vacance des logements, initiée en 2020. Elle y souligne une inadéquation persistante entre les dispositifs publics déployés et la réalité des dynamiques territoriales, dans un contexte où 3,1 millions de logements restaient vacants en 2022, soit 8,2% du parc total. Un million d’entre eux l’étaient depuis plus de deux ans. Face à l’inefficience manifeste des leviers fiscaux, les magistrats de la rue Cambon appellent à une refonte méthodique des approches locales.


​3,1 millions de logements vacants : une donnée structurelle sous-évaluée

En 2022, selon les données de l’Insee reprises par la Cour des comptes, 3,1 millions de logements étaient inoccupés sur le territoire national, dont 1,2 million qualifiés de « structurellement vacants », car inoccupés depuis plus de 24 mois. Cela représente 3,5% du parc résidentiel privé. Cette proportion grimpe à 10,6% en Creuse, 8,8% dans la Nièvre, 8,5% dans la Meuse, contre seulement 1,5% en moyenne dans les zones dites « tendues » – là où l’offre peine à satisfaire la demande.

Cette hétérogénéité territoriale est au cœur du diagnostic de la Cour. Les logements vacants ne se répartissent pas de manière aléatoire, mais répondent à des logiques socio-économiques différenciées : désindustrialisation, vieillissement démographique, attractivité décroissante de certains bassins d’emploi. La vacance n’est pas uniquement urbaine ; elle reflète aussi une fracture territoriale.

Des outils fiscaux puissants… mais inefficaces

Le rapport s’attarde longuement sur la trajectoire fiscale engagée depuis 2017. En sept ans, les recettes issues des taxes sur les logements vacants – qu’elles soient communales ou étatiques – ont été multipliées par 3, passant de 116 millions à 378 millions d’euros en 2024.

Pourtant, ces instruments n’ont pas démontré d’effet dissuasif. La Cour rappelle que « la montée en puissance effective de cette fiscalité n’a en rien endigué le phénomène ». L’inefficacité est double : elle repose à la fois sur un mauvais ciblage des biens concernés et sur l’incapacité de la fiscalité à agir comme levier d’activation immobilière. En outre, l’articulation entre cette fiscalité et la taxe d’habitation sur les résidences secondaires (THRS) demeure incohérente et juridiquement confuse.
 

Des plans d’action limités à la sensibilisation, sans régulation ni financement

Le « plan national de lutte contre les logements vacants » lancé en 2020 se résume à une boîte à outils non contraignante à destination des collectivités. Aucune norme réglementaire, aucun fléchage budgétaire. Le dispositif repose sur le volontarisme local, mais sans levier coercitif ni soutien structurant.

Parmi les rares leviers opérationnels, l’intermédiation locative est citée comme une piste prometteuse : environ 40.000 logements auraient été remis sur le marché entre 2017 et 2022 grâce à ce mécanisme, qui repose sur la délégation de gestion à un tiers garantissant paiement des loyers et critères sociaux. Toutefois, cette stratégie reste marginale à l’échelle du parc inoccupé.

Une réponse différenciée par territoire : condition sine qua non de l’efficacité

Le principal apport du rapport réside dans son plaidoyer pour une action différenciée. L’universalité des instruments fiscaux masque l’hétérogénéité des causes. À Paris, la vacance relève souvent de choix spéculatifs ou de logements très dégradés. À Guéret, elle traduit un désintérêt du marché pour certains segments patrimoniaux.

La Cour plaide donc pour une montée en puissance des prérogatives locales, en dotant les communes d’un accès plus simple aux fichiers LOVAC et GMBI, aujourd’hui jugés peu fiables ou lacunaires. Elle suggère également de conditionner certaines aides de l’État à des résultats mesurables en matière de remobilisation de logements.








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